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Les temps difficiles des grossistes en boissons

L'activité des grossistes en boissons est pénalisée par la fermeture des bars et des restaurants.

L'activité des grossistes en boissons est pénalisée par la fermeture des bars et des restaurants. - Eric Piermont - AFP

Les grossistes en boissons, pénalisés par la fermeture des bars, des restaurants et des hôtels, n'ont presque plus de clients à livrer.

Alors que les rideaux des restaurants sont baissés depuis des mois, et que le monde de l'évènementiel est à l'arrêt, il y a un maillon de la chaîne que l'on oublie souvent: les grossistes en boissons. Pas de fermeture administrative, mais un nombre de clients à livrer qui a fondu comme neige au soleil avec la crise sanitaire. Bars, cafés, restaurants, hôtels, salles de concert, discothèques, salles de congrès, cantines d'entreprises, stades restent fermés.

"Les oubliés de la crise sanitaire"

Nous sommes un peu les oubliés" de la crise sanitaire, déplore Jean-Pascal Montaner, à la tête de Distriboissons.

L'entreprise de 500 salariés, spécialisée dans les "CHR" – cafés, hôtels, restaurants – a vu son chiffre d'affaires dégringoler de 98% au mois de décembre, et autant en janvier. "Le PGE [prêt garanti par l'Etat, ndlr] que nous avons pris en mars est déjà fortement consommé. Nous n'avions pas prévu que nos clients fermeraient une deuxième fois", poursuit le dirigeant. L'entreprise perd à l'heure actuelle 1,8 million d'euros par mois, pour 200.000 euros d'aides gouvernementales.

Du côté de France Boissons, le chiffre d'affaires devrait décliner de 40 à 50% sur l'ensemble de l'année 2020.

Nous livrons encore des hôpitaux, des Ehpad, des restaurants scolaires, quelques gares et aéroports, mais le reste est quasiment à l'arrêt. D'autant que, pour ceux que nous livrons, c'est essentiellement de l'eau, qui n'est pas le produit le plus valorisé en termes de prix", souligne son président Loïc Latour, qui estime que la vente à emporter, si elle permet à certains restaurateurs de compenser un peu la perte de revenus, reste "un mirage".

"Une bombe à retardement"

La vraie crainte, pour eux, ce sont les stocks. "C'est une bombe à retardement", prévient Jean-Pascal Montaner. Les produits qu'ils vendent ne sont pas périssables mais possèdent une "date de durabilité minimale" (DDM), c'est-à-dire qu'ils risquent une altération du goût au bout d'un certain temps. Sans risque pour la santé, elle peut être prolongée de quelques mois après une validation de la DGCCRF, mais pas indéfiniment. Et pour certains produits, comme les fûts de bière, ce n'est même pas possible. D'où le risque de se retrouver avec un grand nombre de boissons invendables dans leurs entrepôts.

Avec une situation sanitaire encore compliquée, et la menace d'un nouveau confinement, l'horizon est très peu dégagé pour la réouverture de leurs clients, et peu s'aventurent à donner une date de reprise.

Nous avons besoin de visibilité. Il n'y aurait rien de pire que d'apprendre le vendredi soir que les restaurants et les bars pourront ouvrir le lundi suivant. Si nous sommes prévenus à J-8, nous serons capables de remettre l'organisation en route et de gérer les approvisionnements", assure Loïc Latour, dont l'entreprise fournit 50.000 clients, dont 33.000 cafés, hôtels et restaurants.

Au printemps, à la levée du premier confinement, les salles des bars et des restaurants et les chambres des hôtels s'étaient remplies, et les professionnels s'étaient réjouis de la forte consommation. De quoi s'attendre au même phénomène lorsque le moment arrivera dans les prochains mois? C'est, en tout cas, ce qu'espèrent Jean-Pascal Montaner et Loïc Latour, qui soulignent tous les deux que les aides gouvernementales, notamment le fonds de solidarité, ont sauvé les bars et les restaurants, et que les faillites devraient être finalement peu nombreuses.

Jérémy Bruno